Je suis la quatrième fille du diable, né dans les entrailles de la terre, plus particulièrement dans le premier cercle, celui de la luxure... Ma mère, Lilith, étant forcément liée à ce pêché, cela aurait été étonnant que je naisse ailleurs mais soit. Je suis née quelques minutes à peine avant la cinquième fille du diable : ma soeur jumelle, Desna. J'ignore si cela est naturel chez les jumeaux, mais j'ai immédiatement su que je devrais toujours la protéger, m'assurer qu'aucun mal ne lui soit fait. On peut dire que j'ai échoué à la tâche mais nous y reviendrons.

Dans les premières années de mon existence, j'ai découvert ce qu'être une fille du diable signifie! Tout d'abord, l'un des pêchés capitaux nous marque de sa présence. Le mien était évident : l'orgueil! Je veux être la meilleure, je suis la meilleure en fait! Un narcissisme qui ne m'a pas attiré que du bien il faut l'avouer, notamment parce que cela se frotter forcément au caractère de l'une de mes sœurs plus âgées, marquée du sceau de la jalousie. Rien de bien grave cependant, il faut le dire nous avons de la chance dans la famille, nous nous entendons toutes très bien, certes il y a parfois des querelles mais, c'est la famille après tout! Rien de plus normal je suppose? Ensuite, l'incapacité à aller sur terre, le domaine de Dieu nous est interdit! Nous qui naissons dans les ténèbres, vivons dans les ténèbres. Certes, l'enfer n'est pas si mal, pour des démones il n'y a rien de bien effrayant à y résider surtout que, en étant les filles du grand patron, nous sommes un peu comme les princesses de ce royaume. Pourtant, à ce moment déjà je ressentais un profond ennuie qui ne me quitta jamais réellement.

Les années passant, je suis restée très proche de Desna, nous avions le même âge alors forcément, nous passions la plupart du temps ensemble et si nos passions étaient différentes, nous trouvions toujours le temps de les partager. J'ai joué avec elle à ses jeux vidéos - sans réellement en comprendre l'intérêt - elle m'a accompagné à mes premières soirées dans les cercles démoniaques. Nous sommes les deux faces d'une même pièce : elle solitaire, introvertie, calme... Moi, extravertie, aimant la compagnie nombreuse et trouvant le plaisir dans la fête... C'est lors d'une de ses soirées qu'elle a bu son premier verre d'alcool, je me souviens même le lui avoir servit. Si j'avais alors su les conséquences futures, sans doute ne l'aurais-je jamais fait.

Avec le temps, j'ai commencé à en avoir assez. L'enfer c'est grand, c'est remplie de monde, mais ce sont toujours les mêmes personnes, les mêmes démons, les mêmes damnés... J'ai commencé à me rebeller contre l'autorité de mon père, adoptant un style qui m'est propre, très rock/punk comme l'appelle certains mortels qui sont tourmentés pour l'éternité. Apparemment, le métal est la musique du diable - chose étrange, papa écoute surtout de la musique classique - alors, comme un doigt d'honneur à ses goûts musicaux, j'ai monté un groupe en son honneur avec Desna mais également deux autres de nos sœurs, me cachant bien de leur dire que c'était uniquement pour emmerder notre père que je faisais cela. The Hell's sisters! Un groupe de métal satanique connu dans les neufs cercles... Cela m'a occupé un instant mais ne m'a pas apporté la liberté.

C'est alors qu'il est apparu : un long couloir, comme une entrée de scène que je n'avais jamais vu dans aucun des recoins de l'enfer. Je l'ai emprunté et me suis retrouvé ailleurs : une ville merveilleuse, des êtres que je n'avais jamais vu, des démons qui ne torturaient personnes, des humains qui ne souffraient aucun supplices... Je me souviens du temps passé dans Amaryllis la première fois, des plaisirs découverts et éprouvés, des règles du système que j'ai enfreins presqu'immédiatement juste pour essayer et perdant un compte de droit. Je ne voulais pas vivre cette nouvelle aventure seule cependant, Desna! Je suis retourné la chercher, apprenant par la même occasion qu'elle ne pouvait pas voir mon portail, pas plus que l'emprunter d'ailleurs. Je lui ai décris Amaryllis, la partie nord de la ville et les jeux auxquels elle ne pourrait jamais joué en enfer. Cela a fait grandir son envie, bientôt elle aussi avait son portail.

La ville a été notre secret un instant, un moment plus ou moins long et agréable jusqu'à cette nuit fatidique... Une soirée organisée au Nord du royaume dans un club nommé le primevère. Je m'amusais à être le centre de l'attention lorsque j'ai entendu Desna hurler qu'on la lâche... Un homme semblait bien trop proche de ma sœur. Pourquoi le système ne faisait-il rien? C'était un réprouvé? J'ai foncé sans réfléchir, personne ne touche ma soeur! J'ai écrasé ma cigarette sur le front de cet imbécile, lui brisant le poignet avec rage et perdant un second compte de droit par cette action... Quoi? J'ai alors compris : ivre, Desna venait de perdre ses droits, devenant une réprouvée... C'était ma faute! J'ai attrapé ma soeur par la main et l'ai entraînée avec moi jusqu'à la zone des logements, j'avais assez de crédit pour un petit studio, je suis donc entrée avec elle, commençant la location de l'endroit... Je n'ai pas dormi cette nuit, serrant ma sœur contre moi alors qu'elle se reposait, je pleurais silencieusement pour ne pas la réveiller... Qu'avais-je fais? Je devais rester avec elle, vivre ici, trouver un travail mais... Étais-je vraiment capable de m'occuper d'elle alors qu'elle avait perdu ses droits par ma faute?

Je l'ai laissé dormir le lendemain, j'avais besoin d'aide et une seule personne vers laquelle me tourner. Je suis retournée en enfer, me suis approchée de ma soeur aînée, la première fille du diable : Calistria...

"J'ai... J'ai besoin d'aide!"

Explosant en sanglot, je lui ai tout raconté, Amaryllis, la soirée, le destin de notre soeur... Je n'ai jamais autant entendu ma sœur hurler qu'à cet instant, heureusement, elle a finit par se calmer et accepter de m'aider.

Depuis, nous vivons toutes les trois ensembles à Amaryllis, cherchant un moyen pour permettre à notre sœur de retourner avec nous dans notre monde et la protégeant de quiconque pourrait lui vouloir du mal. Au moins, rien ne permet de savoir qu'elle est reprouvée et, même si elle ne touche pas de crédit, elle travaille avec nous! Nous avons continué notre groupe - devenu trio - en ville pour gagner des crédits. La seule chose que je redoute maintenant, c'est de devoir expliquer notre longue absence à notre père lorsque nous pourrons enfin rentrer chez nous...